Il y a plusieurs manières de partager les peintres en catégories opposées. Celle que l'on devrait privilégier consiste à distinguer ceux qui savent exactement, ou presque - il y a toujours dans le geste du peintre, l'intervention du hasard qui lui est propre – ce que deviendra la toile sur laquelle il est en train de travailler, de ceux dont l'hésitation et le doute conduisent finalement au résultat qu'ils poursuivent.
Jo Meynent est le peintre de la surprise. C'est la surprise qui, au détour d'une rue, l'attend et le guette, mais c'est lui qui en prend possession, ou alors sans détourne, la rejetant ainsi de façon définitive.
Jo Meynent est un autodidacte. Cela est important à savoir, cela explique sa disponibilité, ou son ouverture à toutes les influences. Mais non pas celles d'autres artistes qu'il aurait eu l'occasion de découvrir ou de rencontrer, mais celle du micro - ou macrocosme qui l'entoure, avec tout son tourbillon de manifestations et d'événements.
Jo Meynent passe sans transition ou plutôt sans « passage » du figuratif à l'abstrait, comme de l'abstraction au conceptuel. Il est guidé par son instinct, et lorsque celui-ci se dérobe ou se fourvoie, son intelligence picturale le remet sur le droit chemin.
Comme un enfant qui joue au cerceau, sa main guide l'objet qui roule, en même temps que l'objet l'entraîne ici ou là, là où il ne pensait guère aller, vers une décharge en pleine campagne, où il fait abondante cueillette de trouvailles hétéroclites, qu'il transforme ensuite en créations anthropomorphiques, ou bien encore en images végétales ou minérales. Tout impressionne - au sens photographique du terme - Jo Meynent, de la rencontre de deux faisceaux lumineux sur un mur ou un tapis à la stridence des couleurs irradiées par un coucher de soleil, de nuages de poussière soulevés par les roues d'un char à la fulgurance d'un coup de tonnerre dans les bois.
Jo Meynent n'est pas un peintre de la nature, mais plutôt le découvreur des perceptions que l'on peut ressentir en présence des spectacles naturels ou humains. Il n'est pas non plus un analyste, dans ce sens qu'il ne part jamais d'un schéma préétabli qu'il développerait ensuite dans diverses directions, jusqu'à atteindre un objectif final déterminé par un cheminement de réflexion et, justement d'analyse. Sa spontanéité, toujours maîtrisée par le métier qu'il a acquis rapidement au fil des années, le pousse à la conquête d’expériences incessamment renouvelées.
On a beaucoup parlé de l'aspect mystique de l'œuvre de Jo Meynent, vu que parmi ses meilleurs tableaux certains traitent de sujets religieux - tels Le Christ ou Le vendredi Saint – mais l'aspect le plus prenant de son œuvre est son caractère mystique au sens primitif du terme, celui qui se dégage - ou tente de se dégager - du secret le plus profondément enfoui dans son Ame.
Retrouvons ou découvrons ici le monde de cet artiste hors du commun, dont l'œuvre est modelée aussi bien par son moi sensible que par son « hasard », qu'il défie et qu'il apprivoise.
Simon Spierer (1926-2005)Merci à mon ami Simon qui m'a beaucoup appris et permis de rencontrer tant d'artistes de talent… Sa collection de sculptures peut aujourd'hui être admirée au Musée du Land de Hesse à Darmstadt
( www.riethauser.com/filmoSIMON.html ).
avec Simon Spierer en 2003
avec César en 1989